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car l'amour est ma religion et ma foi » ( Ibn Arabî )

En Tunisie, une musulmane peut épouser un non-musulman

21, Juil 2020 by Philippe de Briey">Philippe de Briey in Actualités Islam,Dialogue,Droits humains,Foi musulmane     No Comments

C’est en octobre 2017 que le gouvernement tunisien a annoncé le retrait d’une circulaire de 1973 qui empêchait le mariage d’une Tunisienne avec un étranger (sous-entendu non-musulman).

NDR: La Tunisie se montre ainsi à l’avant-garde en matière de liberté religieuse. C’est un changement de haute signification symbolique, de reconnaissance de la liberté de religion et d’égalité des droits entre hommes et femmes. C’est pourquoi nous rappelons cette actualité de 2017.

Pour le Groupe des foyers islamo-chrétiens (Gfic), qui venait de fêter ses 40 ans à Paris, c’est « une digue qui a sauté ».

« Extraordinaire », « fantastique », « un signe d’espoir », de « modernité »… Simplement « amoureux », fiancés ou déjà mariés, voire parents ou grands-parents, les couples islamo-chrétiens n’ont pas assez de mots pour commenter la décision du président tunisien, Beji Caïd Essebsi, d’autoriser les Tunisiennes – supposées musulmanes – à épouser des étrangers – supposés non-musulmans. La décision a été annoncée le 14 septembre. Le Groupe des foyers islamo-chrétiens, qui fêtait samedi ses 40 ans au Collège des Bernardins à Paris, y voit une heureuse coïncidence.

Les plus anciens n’ont qu’un seul regret : qu’elle n’ait pas été prise plus tôt. « C’est quand même fou d’avoir attendu 2017 pour faire un tel pas », remarque Pierre, dont le mariage avec une Algérienne n’est pas reconnu dans son pays (1). « Pas trop tôt », appuie Leïla, mariée à Antoine depuis quatre ans.

La promesse de pouvoir marcher « main dans la main dans la rue »

Les plus jeunes, eux, nourrissent tous les espoirs. Amoureux d’une jeune Tunisienne qui vit, avec sa famille, de l’autre côté de la Méditerranée, Baptiste l’avoue : il a « pleuré de joie toute la journée » lorsqu’il a appris la nouvelle. Le jeune homme rêve de pouvoir « marcher côte à côte dans la rue » avec sa bien-aimée et se félicite que « l’officier d’état civil soit désormais obligé de reconnaître » leur éventuel mariage.

Même si le chemin risque d’être long… « Sa famille est très traditionnelle », soupire-t-il, en racontant ces échanges sur Internet au cours desquels son amie lui a listé « tous les arguments tirés du Coran » démontrant que leur amour est impossible.

De fait, l’interprétation ultra-majoritaire autorise un musulman à épouser une non-musulmane, mais non l’inverse. Cette question de la « légalité » d’un mariage entre une musulmane et un non-musulman est donc l’une de celle qui revient le plus dans les café-couple du Gfic.

« Nous, les hommes musulmans, subissons la pression familiale, et souvent aussi les réticences de notre belle-famille catholique. Mais pour les femmes musulmanes, la pression est multipliée par je-ne-sais-combien à cause de cet interdit religieux », reconnaît Adel.

La fin des « conversions de convenance » ?

Certains, qui – comme Matthieu – ont accepté ce qu’ils appellent « une conversion de convenance », mesurent particulièrement l’avancée. Pour faire reconnaître son mariage en Tunisie, il s’est plié à la procédure locale : envoi d’un dossier, puis convocation – avec quelques autres Français comme lui – devant le grand mufti de la mosquée de la Zeitouna à Tunis, visiblement « pas dupe ».

« On récite la chahada, cela dure peut-être 20 mn en tout », se souvient Matthieu. « Je l’ai vécu comme une simple démarche administrative, mais l’ensemble n’est pas très agréable. »

À lui et aux autres, l’intervention, samedi, de l’imam d’Ivry-sur-Seine, Mohamed Bajrafil, a mis du baume au cœur. Ce jeune imam, spécialiste de fiqr (droit musulman), a affirmé que « l’interdit » d’un tel mariage, intériorisé par une immense majorité de savants comme de fidèles, repose sur une fausse interprétation du Coran.

Une prise de position « incroyable », pour les responsables de l’association, qui se souviennent de leur « déception » lors de rencontres à ce sujet avec différents imams il y a trois ou quatre ans…

(réaction d’une lectrice: « Un journal parlait à l’époque d’un « coup de force contre les mentalités », à fortiori dans le sud ultra-conservateur. Pour le reste, une mesure acceptable dans les milieux aisés et cultivés, applicable à Tunis et dans les grandes villes de la côte. Et qu’en est-il maintenant de l’inverse ? Du mariage d’un Tunisien avec un non-musulmane, obligée à une époque de se convertir (ce qui allait de soi dans l’esprit du conjoint) ».)

Lutter contre le patriarcat

Suite : https://africa.la-croix.com/couples-islamo-chretiens-ne-plus-interdits-tunisie/

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