Film : Une femme prêtre dans l’Eglise catholique : scandale ou acte prophétique ?

22, Nov 2019 by Philippe de Briey">Philippe de Briey in Actualités chrétiennes,Foi chrétienne     Femmes   No Comments

Les téléspectateurs francophones ont pu regarder ce lundi 18 à 21h10 sur la Trois (RTBF), un film documentaire qui pose une question capitale. Intitulé « Une femme prêtre, la passion selon Myra », il est encore visible sur internet durant 3 jours. Je l’ai trouvé remarquable, très interpellant, à recommander chaudement.

Car, s’il y a un domaine où l’Eglise catholique me semble vraiment tout à fait dépassée par notre époque, n’est-ce pas sur celui de reconnaître concrètement aux femmes leurs remarquables qualités, de jugement, de relations humaines, de capacité d’écoute en profondeur, de compassion vécue à l’égard de toutes les souffrances et des exclusions, de profondeur dans la prière et dans la relation à Dieu et à Jésus ?

Notre Eglise catholique, contrairement aux Eglises protestantes, continue à se réfugier derrière l’argument des 12 apôtres, tous hommes, pour refuser cette adaptation aux « signes des temps », alors qu’il aurait été totalement inimaginable à l’époque de Jésus de placer des femmes parmi le groupe qui devait symboliser les douze tribus d’Israël. 

N’est-ce pas tellement triste, tellement ressemblant à l’esprit littéraliste des pharisiens que Jésus dénonçait avec force, tellement contraire au sens de la justice et à la reconnaissance concrète des qualités des femmes, en partageant avec elles les pouvoirs confiés par le Seigneur ?  Ceci est perçu par beaucoup, dans et hors de l’Eglise, comme une profonde contradiction, un contre-témoignage qui fait le plus grand tort à sa crédibilité, et donc à la foi en elle. 

Le film offre de temps en temps des images des conciles ou synodes au Vatican, tous ces évêques et cardinaux couverts de pourpre avec leur mitre. Tout ce falbala du Moyen-Age me fait penser au discours virulent de Jésus aux pharisiens :

« Ils agissent pour se faire remarquer des hommes. Ils élargissent leurs phylactères et allongent leurs franges, ils aiment à occuper les premières places dans les dîners et les premiers sièges dans les synagogues et à être salués sur les places publiques… » (Mt 23, 5-7)

Les religions aujourd’hui me semblent se trouver devant un très grand défi : soit elles s’adaptent au grand progrès actuel de l’humanité dans son attitude à l’égard des femmes, soit les hommes qui les dirigent refusent de partager leur pouvoir, ce qui amène un très grand nombre de personnes, surtout les femmes et les jeunes, à se détourner de ces institutions, les considérant comme incapables de respecter vraiment et concrètement les droits des femmes, et par là même leurs propres principes de justice, d’égalité, de non-discrimination, à cause de préjugés d’un autre âge. 

Je vous recommande donc fortement de prendre une ou deux dizaines de minutes pour regarder au moins les 15 premières minutes de ce film, car elles sont plus parlantes que beaucoup de discours sur la question en reflétant l’ambiance priante, joyeuse et fraternelle de cette paroisse de Rochester (USA) et l’esprit qui anime ses trois prêtres, Jim Callan, curé jusqu’en 1998, Mary qui lui a succédé et Myra qui vient d’être ordonnée.

(*) Ce film, on peut encore le voir durant quelques jours sur https://www.rtbf.be/auvio/detail_une-femme-pretre-la-passion-selon-myra?id=2564610

Quelques extraits du film (3 minutes) sont accessibles sur https://www.facebook.com/watch/?v=2930032743692529

Mais il est beaucoup préférable de voir tout le film, ou du moins les 15 ou 20 premières minutes. 

Espérant que vous trouverez le temps d’y jeter un coup d’œil et que vous en serez intéressé, je vous souhaite un beau we ! 

Ce 22/11/2019

PHILIPPE DE BRIEY 

52, Rue Haute, 1348 Louvain-la-Neuve 

Http://reli-infos.be

P.S. Je suis bien conscient qu’il est encore trop tôt sans doute dans l’opinion publique catholique, surtout dans le clergé africain, pour un tel changement, mais ce qui fait mal, c’est le fait que le pape François, que j’apprécie par ailleurs énormément, semble avoir affirmé comme ses prédécesseurs que cette question était clôturée définitivement.

Espérons qu’il fasse avancer au moins la question du diaconat féminin, afin de rendre visible la volonté de l’Eglise de donner enfin pleinement aux femmes la place qu’elles méritent ? Car si les hommes qui dirigent l’Eglise catholique font de beaux discours sur la femme, mais se gardent bien de partager les pouvoirs avec elles, alors ne doit-on pas les qualifier d’hypocrites, comme Jésus le fit avec les pharisiens ?

Bien sûr, ceci paraîtra scandaleux à certains, mais Jésus aussi fit scandale et fut dénoncé comme provocateur. Ce que fit le curé Jim Callan à Rochester (de faire ordonner une femme pour lui succéder) fut aussi vu comme scandaleux, mais pourtant ne peut-on pas y voir comme un acte de désobéissance civile non-violente indispensable pour faire apparaître une vérité que l’institution se refuse à reconnaître : l’égalité entre hommes et femmes, y compris sur le plan religieux ?  Les religions ne devraient-elles pas être plutôt en avant-garde de cette évolution dans un bon sens, plutôt qu’en arrière-garde défensive de la misogynie et du machisme qui font encore tant de dégâts dans le monde aujourd’hui ?

Dans le film, il est dit qu’aujourd’hui il y a aux USA plus de 300 femmes prêtres catholiques et que Rome a cessé de les excommunier, mais ne sait pas quoi en faire. Selon un théologien belge, Paul Tihon, « C’est assez le style de François : voir ce qui se vit, et « laisser vivre ». Si c’est une branche catholique (qui doit ressembler de près aux anglo-catholiques), si ça dure, ce sera un signe de plus dans la bonne direction. Il doit avoir de bonnes raisons, vu son regard sur la planète, pour penser qu’il est trop tôt pour supprimer la règle du célibat et il hésite même pour les viri probati. Rochester a été une « transgression réfléchie ». Certains changements nécessaires doivent passer par là « .