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Imams détachés, organisation de l’islam… Ce qu’il faut retenir du discours de Macron contre « le séparatisme islamiste »

21, Fév 2020 by Philippe de Briey">Philippe de Briey in Actualités Islam,Islamisme     No Comments

Depuis Mulhouse, Emmanuel Macron a dévoilé, mardi 18 février, les grandes lignes de sa stratégie de « lutte contre le séparatisme islamiste » à moins d’un mois des élections municipales. (…)

Faut-il lutter contre le « séparatisme » ou contre le « communautarisme » en France ? Le choix sémantique de l’exécutif est définitif (voir encadré plus bas). « Notre ennemi est le séparatisme » mais « il ne s’agit pas de stigmatiser quelque religion », a signifié Emmanuel Macron. (…) Il a dévoilé les grandes lignes de sa stratégie de « lutte contre le séparatisme islamiste » qui doit, selon lui, se construire, « autour de quatre lignes de force » : « reprendre le contrôle et lutter contre les influences étrangères, en particulier à l’école et dans les lieux de culte », « favoriser une meilleure organisation du culte musulman en France, dans le respect de la laïcité », « lutter avec détermination contre toutes les manifestations séparatistes et le repli communautariste » et « ramener la République là où elle a démissionné, là où elle n’a pas toujours été au rendez-vous » car « le séparatisme se nourrit de l’absence, dans certains territoires, d’une offre alternative dans le champ social, sportif, périscolaire, sanitaire, culturel ».

(…)

La fin définitive des ELCO en 2020

Dans sa lutte contre le « séparatisme », Emmanuel Macron a ainsi annoncé la fin des enseignements de langue et de culture d’origine (ELCO) pour la rentrée 2020. Ce dispositif, mis en œuvre depuis les années 1970 sur la base d’accords bilatéraux avec neuf pays (Algérie, Croatie, Espagne, Italie, Maroc, Portugal, Serbie, Tunisie et Turquie), est remplacé par les enseignements internationaux de langues étrangères (EILE). (…)
A ce jour, quelque 80 000 élèves à travers la France bénéficient chaque année des ELCO, dispensés dans leurs établissements scolaires par des enseignants en langue envoyés par le pays d’origine. (…)
« le problème que nous avons aujourd’hui, c’est que nous avons de plus en plus d’enseignants qui ne parlent pas le français (…) et, je vous le dis en responsabilité comme président de la République, je ne suis pas à l’aise d’avoir, à l’école de la République, des femmes et des hommes qui peuvent enseigner sans que l’Education nationale puisse exercer le moindre contrôle », en particulier sur le programme, a déclaré le président, pour qui il est « indispensable » que les enseignants en question puisse « parler et maîtriser le français », « respecter les lois de la République » et qu’un droit de regard soit exercé sur le contenu de leur programme.

La Turquie dans le viseur de Macron

« Nous avons proposé à l’ensemble des pays concernés de transformer le dispositif ELCO en EILE. Nous avons réussi avec tous ces pays, sauf la Turquie. A ce stade, je ne désespère pas » de conclure un accord, a informé le président. (…)

A ses concitoyens d’origine turque, « ils sont à mes yeux pleinement Français. (…) Mais on ne peut pas avoir les lois de la Turquie sur le sol de France », leur adresse-t-il.

La fin progressive des imams détachés

Le chef de l’Etat a ensuite promis des mesures fortes – sans les détailler à ce stade – contre le financement étranger des lieux de culte « pour garantir leur pleine transparence sur les origines et les finalités ».

Emmanuel Macron a, en revanche, annoncé sa volonté ferme de mettre fin au système de détachement des imams, au nombre de 300 aujourd’hui en France venus de l’Algérie, du Maroc et de la Turquie, y compris pendant le mois du Ramadan. Une démarche qui vise à «sortir de l’islam consulaire » et à « réduire les influences étrangères ».

« Le dialogue en la matière avec le Maroc et l’Algérie a été exemplaire », a-t-il souligné, faisant comprendre ainsi que les échanges avec la Turquie, qui fournit le plus gros contingent d’imams détachés, ne sont pas au beau fixe sur le sujet.

Le CFCM attendu au tournant

« En raison de la loi de 1905 et de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’Etat français ne peut pas former, contrôler, désigner des imams sur le territoire de la République mais nous pouvons, dans le dialogue avec le CFCM, demander à celui-ci de s’organiser, de former et de certifier celles et ceux qui prédiquent au nom de l’islam en France », a indiqué Emmanuel Macron.

Du CFCM, « j’attends pour la fin du mois de mars des propositions concrètes » afin de « permettre une police des cultes plus efficace » et de « traquer les dérives face auxquelles nous sommes démunis car il n’y a pas de véritable structuration (de l’islam) en France ». « Nous tirons les conséquences de ce travail avec le CFCM début avril », a-t-il conclu.
« Le problème que nous avons, c’est quand, au nom d’une religion ou d’une appartenance, on veut se séparer de la République, ne plus respecter les lois et qu’on menace la possibilité de vivre ensemble en République et qu’on menace les autres de le faire. »

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Hanan Ben Rhouma

Rédactrice en chef de Saphirnews