« Je crois en la religion de l’Amour, où que se dirigent ses caravanes,
car l'amour est ma religion et ma foi » ( Ibn Arabî )
09, Fév 2021 by Philippe de Briey">Philippe de Briey in Documentation,Droits humains,International,Justice sociale No Comments
Le coronavirus a exacerbé les inégalités dans la quasi-totalité des pays du monde. Une première depuis près de 100 ans, d’après un rapport publié par Oxfam International le 25-1-2021. Oxfam a interrogé près de 300 économistes de 79 pays, dont la Belgique.
À la veille du Forum économique de Davos, Oxfam publie son nouveau rapport international “Le virus des inégalités” (accessible en bas d’article). Il révèle que la pandémie a frappé les personnes vivant dans la pauvreté beaucoup plus durement que les riches, avec de lourdes conséquences sur les femmes, les personnes noires, les Afrodescendant.es et les peuples Autochtones.
Oxfam a interrogé près de 300 économistes de 79 pays, dont la Belgique. 87 % des répondant.e.s ont déclaré s’attendre à ce que les inégalités de revenus dans leur pays s’intensifient du fait de la pandémie. Des centaines de millions de personnes ont perdu leur emploi. Entre 200 et 500 millions de personnes supplémentaires pourraient avoir basculé dans la pauvreté en 2020.
Pendant ce temps, les milliardaires ont vu leur fortune augmenter de 3.900 milliards de dollars entre le 18 mars et le 31 décembre 2020. Leurs fortunes cumulées suffiraient amplement à vacciner la totalité de l’humanité et empêcher que d’autres personnes ne basculent dans la pauvreté des suites de la pandémie.
“Depuis le début des recensements, les inégalités n’ont jamais atteint un tel niveau.”
Gabriela Bucher, directrice générale d’Oxfam International.
Les femmes sont surreprésentées dans les secteurs de l’économie les plus durement touchés par la pandémie, en particulier le secteur de soins de première ligne : elles représentent jusqu’à 70% des agents de santé et d’aide sociale. Ces postes ont exposé les femmes à un risque marqué, surtout lorsque l’accès aux équipements de protection était limité.
Par ailleurs, au cours du premier mois de la pandémie, les 740 millions de femmes dans le monde qui travaillent dans l’économie informelle ont vu leurs revenus chuter de 60%, sans qu’elles puissent bénéficier d’une quelconque sécurité sociale comme des allocations de chômage.
Dans les pays du monde entier, les personnes noires et afrodescendantes, les peuples Autochtones et les communautés historiquement marginalisées et opprimées sont depuis longtemps exclus en nombre des programmes d’éducation, de protection sociale et de soins de santé de qualité. À l’heure actuelle, sous la pression de la pandémie, elles sont encore plus nombreuses à passer entre les mailles du filet de systèmes déjà défaillants et inégaux.
On constate par exemple au Brésil que les personnes afrodescendant.e.s sont 40 % plus susceptibles de mourir de la COVID-19 que les personnes blanches. Même constat aux Etats-Unis : les populations noires et latino-américaines auraient déploré 22.000 morts de moins entre le début de la crise et décembre 2020 si leur taux de mortalité avait été identique à celui des personnes blanches.
Ces inégalités raciales viennent s’ajouter à des inégalités entre riches et pauvres. Dans le monde entier, on observe que les zones peuplées par des personnes en situation de pauvreté ont connu des taux d’infection et de mortalité plus élevés que celles économiquement plus prospères. Au Royaume-Uni, le taux de mortalité est deux fois plus élevés dans les quartiers pauvres. On observe des chiffres similaires en Inde, en France ainsi qu’en Espagne.
Le coronavirus a également accru les inégalités en Belgique. Selon Jozef Mottar, directeur délégué de la Fédération Belge des Banques Alimentaires, depuis la création des banques alimentaires au milieu des années 80, il n’y a jamais eu autant de demandes que l’année dernière. Il parle d’une augmentation de 15 %, soit 20.000 personnes par mois.
Certaines recherches démontrent d’ailleurs clairement qu’il existe un lien entre le taux de mortalité et le niveau de revenus en Flandre, aussi bien avant que pendant la pandémie de coronavirus. Une étude de la KU Leuven indique par exemple que les hommes entre 40 et 65 ans faisant partie des 10 % de revenus les plus faibles courent jusqu’à 5 fois plus de risques de mourir de la Covid-19 que ceux issus de la tranche des 10 % de revenus les plus élevés.
Le lien entre le risque d’infection et la richesse a fait d’ailleurs l’objet d’une analyse approfondie du journal flamand De Tijd. Elle révèle que les taux d’infection sont les plus élevés dans les quartiers les plus pauvres de Flandre. Leurs habitant.e.s sont environ deux fois plus susceptibles d’être infecté.e.s par la covid-19 que les habitant.e.s des quartiers les plus aisés.
Comme ailleurs dans le monde, les écarts de revenus sont énormes entre les métiers de première ligne, particulièrement éxposés au virus et les très hauts revenus. Par exemple, une infirmière belge doit travailler 65 ans pour gagner le même salaire qu’un PDG belge en un an. À l’inverse, il faut à peine 5 jours à un PDG belge pour qu’il gagne l’équivalent du salaire d’une infirmière sur 1 an.
Les inégalités amplifiées par la pandémie de coronavirus ne sont pas une fatalité. C’est un choix politique que de créer un modèle économique juste qui soit inclusif, qui promeuve l’égalité, qui protège la planète et éradique la pauvreté.
Des pays comme la Corée du Sud, la Sierra Leone et la Nouvelle-Zélande ont placé la réduction des inégalités au premier rang de leurs priorités. Le Bhoutan, l’Islande et la Nouvelle-Zélande ont donné la priorité aux indicateurs de bien-être par rapport à la croissance du PIB (produit intérieur brut) lors du calcul de leur budget national. Et en Argentine, un impôt de solidarité extraordinaire sur les super-riches a été voté, qui pourrait rapporter plus de 3 milliards de dollars d’ici 2021.
Pour éviter les conséquences à long terme de la Covid-19, les choix politiques suivants doivent être faits :
Téléchargez le rapport « Le virus des Inégalités »
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