« Je crois en la religion de l’Amour, où que se dirigent ses caravanes,
car l'amour est ma religion et ma foi » ( Ibn Arabî )
24, Déc 2022 by Philippe de Briey">Philippe de Briey in International,Justice sociale,Transition No Comments
« Ralentir ou périr », c’est le nom du livre publié par Timothée Parrique. Cet économiste français, chercheur à l’université de Lund, en Suède, frappe les esprits. Il l’affirme, nous n’avons pas le choix : nous devons sortir du capitalisme.
Timothée Parrique était l’invité de Thomas Gadisseux ce vendredi sur La Première. Il développe sa vision de l’économie de la décroissance.
Dans cette vision, bien-être et protection de l’environnement vont de pair avec modèle économique. D’emblée, il l’affirme, selon lui, « c’est la croissance qui devrait nous faire peur ». « La croissance reste corrélée aux problèmes environnementaux. Quand on entend une croissance d’un, deux, ou trois pourcents de la production, ça veut dire qu’on va devoir utiliser plus d’énergie, qu’on va devoir extraire plus de matériaux. Et donc on va émettre plus de pollution, dans une situation où justement on devrait faire le contraire. », explique-t-il.
Cette vision de l’économie, tendant vers la décroissance, peut faire peur. Car, pour beaucoup, croissance rime encore avec prospérité. « C’est ça que je trouve le plus curieux », poursuit-il. « Quand on parle de croissance, on ne parle pas de prospérité, de civilisation, de bien-être, de mieux-être. On ne parle que d’une chose très spécifique : l’augmentation du pouvoir intérieur brut (PIB). Et le PIB n’est pas un indicateur de richesse. C’est même écrit dans le manuel qui indique comment le calculer. »
Mais alors qu’est-ce que le PIB, si ce n’est pas un indicateur de richesse ? Timothée Parrique définit le PIB comme « un indicateur volumétrique d’agitation économique ». « Ça veut dire que c’est la vitesse à laquelle l’économie va tourner. Mais ça ne nous dit pas si l’économie produit les choses qui mènent au bien-être », nuance-t-il.
Certains pays commencent déjà à se défaire de cette mesure. L’expert cite plusieurs exemples : « En 2019, la Nouvelle-Zélande abandonne le PIB pour construire des budgets bien-être, un tableau de bord de 65 indicateurs de santé sociale et de résilience économique. Pareil pour le Pays de Galles, l’Islande, la Finlande, l’Écosse. On pourrait aussi mentionner le Bhoutan, qui calcule le Bonheur intérieur brut.«
Concrètement, on passe d’un indicateur à une multitude d’indicateurs. « On passe d’une économie de la quantité à une économie de la qualité. Elle demande des indicateurs plus diversifiés », explique le chercheur, qui précise que ce modèle nécessite une hiérarchie entre ces indicateurs. « Dans les pays riches, les indicateurs écologiques auront aujourd’hui priorité sur les indicateurs purement financiers parce qu’on est dans une situation où notre priorité est de rentrer dans les clous de la soutenabilité environnementale. »
Ces derniers mois, de nombreuses économies connaissent la décroissance. Avec la crise sanitaire, et puis la guerre en Ukraine et enfin la crise énergétique, la décroissance s’est imposée au marché. Mais depuis, les gouvernements cherchent à relancer la machine à tout prix. « Au bout d’un certain moment, c’est normal que l’économie se stabilise. On s’obstine à vouloir relancer la croissance, cette espèce de culturisme financier, qui veut grossir toujours plus ». Timothée Parrique propose une autre voie : « Acceptons le fait qu’aujourd’hui, les défis économiques sont des défis de partage, de qualité, d’amélioration de nos institutions économiques. Et ces défis économiques ne vont pas forcément prendre la forme d’une augmentation du PIB.«
La suite de l’interview se trouve dans la vidéo où l’auteur se réjouit qu’une telle conversion des mentalités est bien en train de gagner les jeunes.
On peut trouver un complément d’avis sur cette question chez un économiste français, François Ruffin. Interview intéressant, notamment sur la profonde injustice sociale causée par l’inflation. Ce problème me paraît peu soulevé dans les grands médias, sans doute parce que ceux qui les dirigent ou y jouent un rôle important ne vivent pas la précarité et le cercle vicieux dans lequel les précaires sont enfermés. Vous trouverez cet entretien sur François Ruffin : « Il faut faire redescendre nos dirigeants sur Terre »
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